L’hypercholestérolémie familiale (HCF), l’une des maladies génétiques les plus fréquentes, se transmet sur le mode autosomique dominant. Les mutations causales touchent le plus souvent les gènes qui codent pour les récepteurs impliqués dans l’épuration du LDL-cholestérol (LDL-C, notamment le gène LDLR : la présence d’un seul allèle muté qui définit l’état hétérozygote suffit pour entraîner des élévations souvent impressionnantes des concentrations plasmatiques du LDL-C, très tôt dans la vie, parfois dès la naissance.
Le risque cardiovasculaire est donc d’emblée très élevé au point que de nombreux patients vont développer prématurément une maladie cardiovasculaire souvent sévère. Face à cette menace, les statines représentent la pharmacothérapie privilégiée et, compte tenu de la précocité de l’athérogenèse, il est conseillé de les prescrire le plus tôt possible. Les recommandations de l’European Atherosclerosis Society et de l’American College of Cardiology–American Heart Association font consensus : il est proposé de débuter les statines entre l’âge de 8 et 10 ans, mais si le bénéfice thérapeutique est clairement établi chez l’adulte- de manière rétrospective-, force est de constater que, chez l’enfant, les données à long terme sont peu nombreuses.
Début du traitement par statines entre 8 et 18 ans
Une étude longitudinale d’une durée de vingt années vient combler cette lacune. Elle a inclus 214 patients atteints d’une HCF confirmée d’un point de vue génétique dans 98 % des cas. Tous avaient participé préalablement à un essai randomisé mené contre placebo d’une durée de deux ans dont l’objectif avait été d’évaluer l’efficacité et l’acceptabilité de la pravastatine. Le traitement avait été débuté entre l’âge de 8 et 18 ans. Les participants ont été invités à un suivi clinique et biologique à long terme, de même que les membres de leur fratrie indemnes d’ HCF.
L’épaisseur intima-média (EIM) carotidienne a été mesurée régulièrement, alors que le traitement par les statines était poursuivi.
Au total, 184 patients de la cohorte d’origine (86 %) et 77 membres de la fratrie d’origine (81 %) ont été suivis sur le long terme. Dans la majorité des cas (203/214, 95 %), les données concernant les évènements cardiovasculaires (ECV) éventuels ont été accessibles. Pour ce qui est de la mortalité cardiovasculaire, l’information a pu être obtenue dans 100 % des cas.
Réduction du risque CV constaté après 20 ans de suivi
Chez les patients, les concentrations moyennes de LDL-C ont diminué, passant de 2,37 à 1,61 g/L, ce qui représente une variation de 32 % par rapport à l’état basal. Des taux de LDL-C < 1 g/L correspondant aux objectifs thérapeutiques ont été atteints chez 37 participants (20 %).
L’augmentation de l’EIM carotidienne au terme du suivi a été en moyenne de 0,0056/an chez les patients atteints d’HCF, versus 0,0057 mm/an au sein de la fratrie indemne de cette affection (soit une différence moyenne ajustée en fonction du sexe de -0,0001 mm/an; intervalle de confiance à 95 %, -0,0010 à 0,0008).
L’incidence cumulée des ECV survenus en vingt ans, à un âge moyen de 39 ans, a été nettement plus faible chez les enfants traités dès leur plus jeune âge que chez leurs parents, soit 1 % versus 26 %. Il en a été de même pour la mortalité cardiovasculaire, les chiffres correspondants étant respectivement de 0 % et 7 %.
Dr Peter Stratford